roland topor

roland topor, derechef !, œuvres, exposition du 5 janvier au 22 février 2026, vernissage le lundi 12 janvier de 18 à 20 h 30 au salon d'art

derechef!
roland topor
œuvres multiples
exposition du 5 janvier au 22 février 2026

¡!¡vernissage le lundi 12 janvier de 18 à 20h30¡!¡

Roland Topor (1938-1997) détestait être pris pour un humoriste du dessin ou du pinceau. Topor est drôle évidemment, souvent dès le premier regard posé sur son travail. Mais l’essentiel va au-delà du dessin. L’art de Topor dépasse le rire, et débute juste après. Scutenaire – dont Topor accompagna les poèmes du Bosquet de Sherwood, en 1988, à La Pierre d’Alun – le disait déjà en son temps : « L’humour est une façon de se tirer d’embarras sans se tirer d’affaire. » Chez Topor, c’est l’affaire qui importe, et elle est moins drôle qu’il n’y paraît.
Topor naquit incrédule d’un univers oppressant et dévastateur, du cauchemar jusqu’à l’écrasement. On a cité pour la qualité de ses dessins et peintures, Kubin, Goya, ou Bosch, n’oublions pas Les Métamorphoses du jour de J.J. Grandville ni le monde de Kafka. L’imagination tourbillonnante de Topor, briseur de tabous dès 1962 avec le groupe « Panique », entend subvertir l’effroi du réel par la transgression visuelle.
Topor nous jette en pleine figure l’absurdité d’exister, par le degré d’envahissement monstrueux qu’elle provoque, par la cruauté anatomique de corps difformes. Les humains s’y découpent en tranches les uns les autres. S’y étripent à la hache, affublés d’appendices démesurés. Grotesques de la tête, de la bite ou des pieds, écrasés entre le marteau et l’enclume ou sous leurs excréments. Et le crâne d’un personnage bien coiffé s’ouvre jusqu’au cerveau, fendu en deux par un peigne : l’image devint l’enseigne du Salon d’Art et de Coiffure. Topor n’épargne pas plus le genre féminin. Des figures tantôt séductrices, alanguies ou entreprenantes, tantôt maîtresses de cérémonials délicats, hantent ses fantasmes dessinés. Fin de partie : des mâles bedonnants se retrouvent pendus dans le vide par une cordelette, attachée aux jarretelles d’une écuyère qui n’a pas caché ses appâts, tandis qu’une autre déverse une corne de pièces d’or sur un enchevêtrement de corps masculins assassinés.
Dans ses linogravures – qui nourrirent notamment le recueil Toporlino, en 1986, à l’atelier Clot –, Topor travaille la matière sous la forme d’une ligne claire épurée, faisant jaillir de la confrontation du noir et blanc une efficacité redoutable. Les dessins, d’une grande économie visuelle, font apparaître une vérité sans afféterie. Elle frappe directement un ou deux personnages, souvent un voyeur aveuglé et l’objet de son fantasme. N’est-ce pas le regardeur lui-même que Topor abandonne là ? Et pas vraiment tiré d’affaire.


Alain Delaunois